La rousse saison

 

L’Automne

L’automne au coin du bois,
Joue de l’harmonica.
Quelle joie chez les feuilles !
Elles valsent au bras
Du vent qui les emporte.
On dit qu’elles sont mortes,
Mais personne n’y croit.
L’automne au coin du bois,
Joue de l’harmonica.

Maurice Carême

Pluie

Pluie me mouille
Feuille rouille
Vent me fouette
Vent tempête
Feuille folle
Je m’envole

Solange Innocent

 

Automne

Il pleut
Des feuilles jaunes.
Il pleut
Des feuilles rouges.
L’été
Va s’endormir,
Et l’hiver
Va venir
Sur la pointe
De ses souliers
Gelés. 

Anne-Marie Chapouton

 

L’Acacia

Le vent
Passait, pleurant.
L’acacia dit :
« Vent d’automne
Au front gris
Tu t’ennuies.
Je te donne
Mes feuilles,
Prends, cueille
Et va jouer
Avec ton amie
La pluie.
Le printemps
En son temps
M’en fera des plus jolies. » 

Marie-Madeleine Carbet

 

Villanelle

Une feuille d’or,
Une feuille rousse,
Un frisson de mousse
Sous le vent du Nord. 

Quatre feuilles rousses,
Quatre feuilles d’or,
Le soleil s’endort
Dans la brume douce.

Mille feuilles rousses
Que le vent retrousse.
Mille feuilles d’or
Sous mes arbres morts. 

Alain Debroise

 

L’Automne

L’automne sur les ailes des oiseaux
Couleur de feuille et de forêt qui meurt
Une tendre rousseur qui s’avive
Dans un lambeau de vent arraché
Et les feuilles qui volent avec les ailes délivrées. 

Un seul mouvement qui arrive
Une seule liberté
Feuilles et plumes fondues dans l’air
Flammes qui descendent
Envol sur les terrasses du soir. 

Un seul automne d’envols et de cendres
Une submergeante lumière
Le temps s’achève dans un orage clair. 

Jean Mambrino

 

Automne

Dans le brouillard s’en vont un paysan cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard d’automne,
Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux. 

Et s’en allant là-bas le paysan chantonne
Une chanson d’amour et d’infidélité,
Qui parle d’une bague et d’un cœur que l’on brise. 

Oh l’automne… l’automne a fait mourir l’été.
Dans le brouillard s’en vont deux silhouettes grises.

Guillaume Appolinaire

 

La mort de l'automne

Au vent du nord
Qui le bâtonne,
Le pauvre Automne
Fuit sans remords. 

Le vent le mord,
Lui, dans sa tonne
Se pelotonne.
L’Automne est mort. 

Et son glas tinte
Comme une plainte
Dans les derniers 

Refrains de fête,
Adieu paniers !
Vendange est faite. 

Jean Richepin

 

Chanson d'automne

Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone. 

Tout suffocant
Et blême quand
Sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure, 

Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte
De-çà, de-là,
Pareil à la
Feuille morte. 

Paul Verlaine

 

Automne

Odeur des pluies de mon enfance !
Derniers soleils de la saison !
A huit ans comme il faisait bon,
Après d’ennuyeuses vacances,
Se retrouver dans sa maison ! 

La vieille classe de mon père,
Pleine de guêpes écrasées,
Sentait l’encre, le bois, la craie
Et ces merveilleuses poussières
Amassées par tout un été. 

O temps charmant des brumes douces,
Des gibiers, des longs vols d’oiseaux,
Le vent souffle sous le préau,
Mais je tiens entre paume et pouce
Une rouge pomme à couteau. 

René-Gui Cadou

 

L’automne

Salut ! Bois couronnés d’un reste de verdure !
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours ! Le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards. 

Je suis d’un pas rêveur le sentier solitaire ;
J’aime à revoir encor, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l’obscurité des bois. 

Je voudrais maintenant vider jusqu’à la lie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel :
Au fond de cette coupe où je buvais la vie,
Peut-être reste-t-il une goutte de miel. 

Alphonse de Lamartine